L’île étant presque inhabitée, la Compagnie Française des Phosphates de l’Océanie fut confrontée dès le début à de réels problèmes de main-d’œuvre.

La Compagnie Française des Phosphates de l’Océanie ne put trouver sur place que 25 travailleurs sur les 300 nécessaires, les cadres et spécialistes étant des métropolitains sous contrat. Les années suivantes apportèrent une main-d’œuvre locale un peu supérieure en nombre, mais pas en capacité. La Compagnie dut faire appel à des ouvriers asiatiques, des japonais, bientôt remplacés par des chinois, puis par des annamites qui assureront la plus grande partie du travail jusqu’en 1920.

En 1910, le début

« En mars 1910 arrivèrent 26 indigènes de Manikiki, puis 21 ouvriers japonais. Devant l’échec d’une tournée de recrutement aux îles Australes en février 1911, et devant l’absentéisme manifesté au travail par les polynésiens à Makatea, la compagnie décida d’embaucher 250 Japonais de plus. Les Polynésiens furent longs à s’adapter à un travail suivi. À la date du 12 août 1913, sur 30 manœuvres en fin de contrat, 11 seulement demandèrent à reconduire leur engagement. La mobilité du travail, le caractère discontinu de l’effort, le désir de changer de pays et d’occupation, la lassitude caractériseront longtemps la main-d’œuvre d’origine locale » (Mollet 1962)

L’embauche de Polynésiens ira néanmoins par la suite en augmentant jusqu’à être pratiquement exclusive. Au moment de la guerre, une crise obligera la Compagnie à engager des Polynésiens des Cook. Après la guerre, les Polynésiens français seront plus nombreux à Makatea tandis que le recrutement dans les Australes, à Raivavae en particulier, donnera des résultats très satisfaisants.

Les années 60

« Groupés selon leurs origines et leurs affinités insulaires, ils forment des équipes homogènes reconnaissables à des détails vestimentaires plus souvent qu’à des particularités morphologiques […] Dans les dernières années de son existence, la Compagnie employait 800 travailleurs, tous polynésiens. Avec leurs familles, ils faisaient de Makatea l’île la plus peuplée des Tuamotu, 3 000 habitants en 1960. C’est à Makatea que les Tahitiens commencent à apprendre le sens du travail industriel régulier.  » (O’Reilly 1962)

Un ouvrier de Makatea dans un trou de 8 m de profondeur. 1965. Photo Taote Charles

Un ouvrier de Makatea dans un trou de 8 m de profondeur. 1965. Photo Taote Charles

Ouvrier transportant le minerai avec une brouette. 1965. Photo Taote Charles

Un ouvrier de Makatea dans un trou de 8 m de profondeur. 1965. Photo Taote Charles

Les conditions d’existence étaient très dures. Les mécaniciens de la centrale électrique n’avaient aucune majoration de salaire lorsqu’ils travaillaient par roulement, le dimanche ou la nuit […] Comme il fallait s’y attendre, un syndicat fut bientôt créé, l’instigateur étant un certain Max Bernière, qui exerçait la fonction d’électricien… Le bureau syndical exigea qu’une commission se tienne à Papeete, avec la participation de M. Meunier, directeur adjoint […] La Direction déclara accepter les revendications salariales […] De retour à Makatea, Meunier refusa la majoration et – devant la menace de grève – écrivit au tableau noir de la centrale : « Si vous faites cela, vous irez en prison. » ( Jean Virmouneix 1947)

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Sources :

Louis Molet, 1962. Importance sociale de Makatea dans la Polynésie française. Journal de la Société des Océanistes, Paris, t. XXII.
Correspondance de Jean Virmouneix, mutoi farani en 1947, chef de poste, c’est-à-dire gendarme.
Danton H., 1992. – Makatea. Bulletin de la Société des Études Océaniennes, Paris, n° 258-259
Pierre-Marie Decoudras, Danièle Laplace et Frédéric Tesson, Makatea, atoll oublié des Tuamotu (Polynésie française) : de la friche industrielle au développement local par le tourisme, Les Cahiers d’Outre-Mer, 230 | 2005, 189-214.