On sent une forte chaleur sous les pieds, mais ça ne brûle pas. C’est incroyable !

Organisée par le tahua Raymond Teriierooiterai Graffe, cette cérémonie authentique précède les fêtes du Heiva depuis plus de 60 ans et réunit chaque année plusieurs centaines de spectateurs fascinés par l’intensité de ce moment ancestral.

Umu ti, une très ancienne cérémonie

La marche sur le feu est une tradition en Polynésie qui remonte à la nuit des temps. Celle-ci avait une fonction et un intérêt bien particuliers dont le point de départ est le umu ti qui consiste à cuire dans un four traditionnel des racines de ti (auti, cordyline), pour se prémunir de la saison sèche, matari î i raro, qui dure de mai à novembre. Ainsi cuits, les tubercules de ti pouvaient être conservées pendant de long mois, permettant à la population de faire face à la disette.

Dans certaines îles polynésiennes, une marche sur le feu précédait la cuisson des ti. Elle servait à vérifier la présence des dieux, qui avaient la réputation de se retirer pendant le matari’i i raro. Si les tahu’a (prêtre) parvenaient à marcher sur les pierres de lave chauffées à blanc sans se brûler, cela signifiait qu’ils avaient toujours le mana (le pouvoir) nécessaire à la réussite de la cuisson des ti.

La préparation du four, Umu ti, à Huahine. Photo Itchner

Le four du Umu ti, la veille de la cérémonie, à Huahine, en 1904. Photo Itchner

La marche sur le feu, Umu ti, à Huahine. Photo Itchner

Un « Umu ti » à Huahine en 1904. L’invocation. Photo Itchner

Les préparatifs de la cérémonie du Umu ti

Avant chaque préparation du four, je jeûne durant la semaine qui précède, précise le grand prêtre, Raymond Teeriierooiterai Graffe. Je me retire dans la montagne pour cueillir les auti sacré, pour méditer, jeûner, communier avec la nature et rendre hommage à mes ancêtres.

Ce rituel est, selon lui, indispensable au bon fonctionnement de la marche sur le feu. Le choix de la date de la marche sur le feu est dicté par le calendrier lunaire polynésien, certaines nuits étant bénéfiques et d’autres maléfiques.

La fosse du four du Umi ti, d’environ 8 m sur 2,50 m de large et 0,50 m de profondeur, est remplie de bois de ati (Tamanu) qui a la particularité de dégager une grande chaleur et de se consumer très lentement, puis les braises incandescentes sont recouvertes de pierres volcaniques. Le jour convenu, le four est allumé à 6h00 du matin pour que les pierres soient à bonne température à 18h00.

Le tahu'a Raymond Teeriierooiterai Graffe

Le tahu’a Raymond Teeriierooiterai Graffe

La cérémonie du Umu ti

La cérémonie de la marche sur le feu débute avec des danses incantatoires, puis le grand prêtre entre en scène en « balayant  » les pierres avec des feuilles de auti sacré. Ensuite, les disciples sont invités à traverser la fournaise et à se purifier ainsi le corps et l’esprit.

Le feu est un élément destructeur et de transformation qui a des bienfaits sur l’homme, explique Raymond Teeriierooiterai Graffe. L’énergie acquise durant ce cheminement sur les braises se transmet dans notre vie quotidienne et dans notre environnement.

Le tahu’a sur les pierres brulantes. Photo Tahitiscape 2018

Marche sur le feu 2018. Photo Tahitiscape

Les participants sont invités à marcher sur le feu. Photo Tahitiscape 2018

Cette expérience ne comporte en principe aucun risque, à condition de respecter quelques règles  : il ne faut pas avoir bu d’alcool depuis la veille, les femmes qui ont leurs règles peuvent assister à la cérémonie mais ne doivent pas traverser le four, et il ne faut pas se retourner une fois que l’on a commencé à marcher sur la fournaise.

La marche sur le feu est la seule forme de culture polynésienne qui n’a jamais été dénaturée par l’occident.


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Raymond Teeriierooiterai Graffe