Offrir la main de sa fille « sa belle princesse » au chef des esprits des ténèbres pour avoir la vie sauve. C’est le cruel dilemme qui s’offre à Ui, un habitant de Tevaitoa. Mais tout finit bien et les époux reviennent dans le monde des vivants.

Autrefois, vivait à Tevaitoa sur l’île de Raiatea, un homme du nom de Ui et sa femme Nanuiteao. Ils demeuraient ensemble dans la vallée de Puhau.

Un jour, sa femme lui donna une première fille, qu’elle appela Nanuiteao, puis une deuxième qu’elle appela Hirohiti. La dernière qui naquit fut appelée « Aroarii vahine maitai itetara » qui signifie « Belle princesse ». Contrairement à ses deux soeurs, elle n’était pas encore mariée.

Les esprits des ténèbres rodent

Un jour, les esprits des ténèbres se promenant dans l’île en quête de provisions pour leur chef Tumuiva (tronc bien planté) rencontrèrent Ui. Il s’en saisirent et l’ayant mis dans un panier, l’emportèrent pour le manger ; le considérant comme un mets délicat. Sur leur chemin de retour, ils traversèrent d’abord allègrement un lieu-dit : « pieds légers », puis commencèrent à peiner en traversant un site connu sous l’appellation de « pieds lourds », et c’est enfin à pas pesants qu’ils regagnèrent leur gîte, dans la profondeur des ténèbres.

il n’y a plus qu’une seule belle femme ici

Durant cette pérégrination, le pauvre Ui, enfermé dans le panier, songeait à sa dernière fille Aroariitetara ne cessant de répéter à tout instant « il n’y a plus qu’une seule belle femme ici-bas, et c’est la princesse ma fille ». En entendant ces paroles prononcées par Ui, Tunuiva se présenta devant lui. « Que dis-tu questionna-t-il ? » Hélas ! répondit Ui « Je pensais à ma fille, la seule princesse bonne et belle à la fois. »

Durant ces événements, les esprits étaient partis à la recherche de condiments, devant contribuer à rendre plus délectable à leur palais Ui lui-même, servi comme plat de choix, pour le jour de leur fête, qui était proche.

Le chef des esprits des ténèbres, demanda alors à Ui, si les seins de la princesse étaient encore fermes et vierges. Sur la réponse affirmative du malheureux père, il lui demanda purement et simplement, la jolie princesse en mariage.

La liberté en échange de la main de ma fille

Ui la lui accorda, à la condition qu’il soit libéré.

Heureux de l’assentiment du vieux Ui, Il lui dit: « Comment pourrai-je la prendre ?» et Ui lui indiqua le moyen. « De par ton pouvoir, lui dit-il, de te métamorphoser, tu vas prendre mes traits et tu iras chez moi. Tu demanderas à ma femme où se trouve Aroariitetara. Si elle te répond qu’elle est dans ma demeure, tu iras trouver la princesse, et lui ordonneras d’aller prendre un bain dans la rivière. Lorsque vous serez sur le point d’entrer dans l’eau, tu lui diras de plonger la première, et au moment où elle remontera à la surface, tu la saisiras et l’emporteras dans tes bras ».

Après avoir suivi les avis de Ui, et s’être emparé de la princesse. Tumuia revint et accorda la liberté au vieux Ui qui retourna sur le champ auprès des siens. Son absence prolongée avait semé l’inquiétude parmi eux.

Âroariifétara fut mariée par les esprits à leur chef. Après la célébration du mariage, ils revinrent tous deux à la vie, et demeurèrent jusqu’à la fin de leur vie chez Ui.

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Sources :

Traduit par Namata a Teraitua, fils du pasteur de Maupiti, qui tient ces légendes de son grand père.
Recueilli et communiqué par André Ropiteau – Société des Études Océaniennes. Bull n°36, juin 1930
Photo jeune vahine rêveuse. Lucien Gauthier. Tahiti 1915