Le Komo Mokorea, est un koko (trou bleu) situé sur l’atoll de Makemo, qui d’après la mythologie polynésienne permettrait d’accéder au Pô, le monde de dessous habité par les Mokorea. Découvrez cette rencontre d’un habitant de Makemo avec une femme Mokorea venue chercher de l’aide auprès des humains.

Le trou des Mokorea, Komo Mokorea

Cette large vasque naturelle d’eau douce, appelée Vai Ngatika, se situe sur le motu Vainatika à Makemo. Tout le monde sur l’atoll la connaît sous le nom de Komo Mokorea, (komo signifie eau douce). Elle semble correspondre à une grande grotte verticale de 20 m de diamètre creusée verticalement dans le papa (calcaire corallien), qui donne sur la lentille d’eau. Le résultat est que l’eau y est tout à fait claire et limpide, alors que les déchets végétaux qui tombent dedans devraient la faire croupir. Ce trou serait d’après les anciens, un koko, un tunnel sous-marin relié à l’océan.

Une légende lie ce bassin au mythe décrivant la naissance et la répartition de l’occupation de l’atoll en deux ‘ati ou matakainanga. Mais le Komo Mokorea est surtout connu comme passage vers le Pô, le monde de dessous habité par les Mokorea.

Des bruits de pleurs

Au temps ancien, des habitants de l’atoll de Makemo ne vivaient que de pêche et de coprah. Un jour des hommes venaient de terminer de ramasser le coprah (noix de cocotier) sur le motu Vainatika où se trouve le bassin Vai Ngatika appelé également Komo Mokorea. Ils devaient alors transporter leur récolte au village, l’un des hommes devant rester sur place pour garder le motu et nettoyer la cocoteraie pendant ce temps. Plusieurs heures après leur départ, l’homme resté seul était tellement préoccupé par son travail qu’il ne fit pas tout de suite attention à des bruits de pleurs.

Lorsqu’il les entendit, il demanda qui était là mais personne ne répondit. Croyant avoir mal entendu il continua son travail. Les pleurs recommencèrent encore et il répéta sa question tout en marchant vers le bruit et, tout comme la première fois personne ne répondit. Tout à coup, l’homme entendit des pas comme si quelqu’un courait et il s’est mis à courir dans cette direction. Il s’aperçut, avec stupeur, alors qu’il pourchassait une femme qui se dirigeait vers un trou où elle plongea. L’homme resta près du trou pendant plusieurs heures en se demandant si elle reviendrait.

Le temps passait, rien ne se manifestait, et il décida de retourner chez lui car ses amis devaient bientôt être de retour. Arrivé à son fare (maison), ses amis arrivèrent. Il leur raconta ce qui s’était passé mais personne ne voulu le croire. Il les emmena donc près du trou et ils attendirent que la femme en sorte. Au bout de quelques heures d’attente ses amis le traitèrent de fou, persuadés qu’il n’avait pas vu de femme sur le motu mais qu’il avait sûrement rêvé d’elle.

Une femme Mokorea sortit du trou pour demander de l’aide

Tout à coup la femme sortit du trou, ses amis se précipitèrent pour l’attraper et l’attachèrent. Mais l’homme qui était resté sur l’îlot leur demanda de la détacher car il avait vu de la tristesse dans son regard ainsi que de la peur. Il essaya de la réconforter et de la consoler en lui demandant pourquoi elle avait une telle tristesse et cette peur dans son regard et surtout pourquoi elle avait tant pleuré.

Cette femme le regardait attentivement et voyant qu’elle pouvait lui faire confiance. Elle lui dit qu’elle avait une amie qui était enceinte du seul homme qui vivait avec eux dans la mer sous l’atoll, mais que son amie allait mourir parce que dans la mer il n’existe qu’une façon de mettre un bébé au monde, c’est d’ouvrir le ventre afin d’extraire le bébé des entrailles de sa mère.

Sa seule amie allait donc mourir et elle ne pouvait l’accepter. Elle lui demanda donc son aide.

L’homme descendit sous l’eau pour montrer comment accoucher

L’homme accepta de l’aider en disant qu’il connaît un autre moyen de mettre un bébé au monde mais lui dit qu’il ne pourrait pas respirer sous l’eau pendant longtemps. Mais la jeune femme lui répondit qu’il n’avait pas à s’inquiéter, qu’elle avait des pouvoirs pour lui permettre de respirer sous l’eau et ils plongèrent tout les deux.

Au bout de quelques heures, l’homme et la femme réapparurent : l’amie de la femme avait pu mettre son bébé au monde et rester en vie. Le jeune homme demanda alors à la femme son nom. Celle-ci lui répondit qu’elle s’appelait « Mokorea » et c’est ainsi que le trou fut appelé « Komo Mokorea ».

Une belle histoire avec un heureux dénouement.

Commentaires

Sources :

Olivier Babin. Mokorea, Orovaru, les habitants du Pô. 2000
B. Henrion.  Note sur le Komo Mokorea de Makemo.
Tony Frogier. 2005
Eugène Caillot. Mythes et légendes de Polynésie 1912