Les Mokorea, sont la mythologie polynésienne les habitants du Pô, le monde du dessous. Plusieurs légendes des Tuamotu et des îles Australes, comme celle de la vahine Kairarua de Hao recueillie par Eugène Caillot en 1912, décrivent ces rencontres avec ces êtres étranges aux longs poils qui ne connaissent pas la manière d’accoucher.

Kairarua rejoint le monde des Mokorea

Kairarua était une femme qui habitait Otamaru au nord de l’atoll de Hao. Un jour à la pêche sur le récif du large, au lieu dît te nohoraga tapairu, elle rencontra deux  Mokorea. Ils ressemblaient à des hommes mais avaient de longs poils qui retombaient jusqu’au bas des pieds et des ongles très longs qui leur servaient de harpons pour pêcher le poisson. Ils guettèrent la femme Kai­rarua, l’attrapèrent, se sau­vèrent avec, et après avoir plongé, l’emportèrent dans les trous du récif, des koko.

Kaikura vahine sentit ses pieds heurter le sol d’une terre. Les Mokorea et Kairarua marchèrent, puis arrivés dans un endroit, elle vit beaucoup d’hommes identiques aux deux premiers.

Le nom de cette terre était Vaiari. Il y avait des cocotiers, et les cocos étaient rouges, ainsi que le coprah. Cette femme resta très longtemps là.

Chez les Mokorea, on ouvrait le ventre pour faire sortir l’enfant

Dans ce monde souterrain où habitaient les Mokorea, quand les femmes étaient enceintes et prêtes d’accoucher, la coutume était de leur ouvrir le ventre pour en faire sortir l’enfant. Quand Kairarua eut connaissance de cela, elle dit :

« Il ne faut pas faire comme cela, je vais vous indiquer mon moyen, c’est moi qui vais faire l’accouchement. »

Et Kairarua fit accoucher une femme qui était prête d’être éventrée pour son accouchement. Elle opéra, comme on le fait sur cette terre du haut. Quand les habitants de la terre du bas connurent cette manière de faire les accouchements, ils l’adoptèrent, et les femmes de cet endroit furent reconnaissantes envers Kairarua.

Du coprah rouge pour prouver l’existence des Mokorea

Il existait beaucoup de ressources dans cette terre-là en fait de nourriture : il y avait des taro, des bananes, des cocotiers, des maiore (uru), et toutes les espèces de plantes comestibles indigènes. Dans ce pays-là, les gens ne mangeaient pas de nourriture cuite ; ils la mangeaient crue.

Mais Kairarua vahine n’avait pas oublié la terre du dessus. Elle eut l’idée de se sauver en cachette et aussitôt elle chercha le moyen de réussir à s’échapper et à revoir le monde éclairé du dessus. Elle parvint à arriver à la terre du dessus, et pour prouver qu’il existait une terre dessous l’île de Hao, elle en rapporta du coprah rouge, et quantité de personnes anciennes ont eu connaissance de cette histoire et ont vu, de leurs yeux, le coprah rouge rapporté pour prouver l’existence d’une autre terre.

Les habitants de ce lieu s’appelaient Mokorea ; c’étaient des hommes très longs, couverts de poils, et aux ongles très longs, dit elle.

Coprah rouge

Il existe des terres habitées par des hommes sous les îles Tuamotu

On est persuadé qu’il existe des terres habitées par des hommes sous les îles Paumotu. Il existe peut-être des richesses dans cet endroit qui seront retrouvées un jour. C’est peut-être cette terre qui est la base d’où s’élèvent ces îles. En ce temps-là, souvent on rencontrait, venus de ce lieu, des hommes de ce genre ; mais seulement on n’a jamais pu en attraper.

Voilà ce que quelques anciens de notre monde ont entendu dire de ces hommes, et ils nous l’ont transmis.

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Sources :

Eugène Caillot , Mythes, légendes et traditions des Polynésiens, Paris 1914, p 57 à 60. Réédité en 2000 par les éditions Haere Po (Tahiti)
Jean Noël Putua (CSP Hao) et Olivier Babin 2001
Dessin : Daniel Akeou, CSP Hao  2001