Le cœur de l’ancien hôpital de Mamao a cessé de battre en 2010. Ouvert en avril 1970, le Centre Hospitalier Territorial, plus communément appelé Hôpital de Mama’o, aura accueilli entre ses mûrs, pendant quarante années ; naissances, décès, consultations, opérations, diagnostiques, espoirs et redditions. Sur cinq hectares plats et arborés, il se dressait aux portes du centre ville de Papeete, côté Est, observant silencieusement le quotidien des polynésiens.

Beaucoup de célébrités polynésiennes sont venu chercher soins et attention au sein de l’Hôpital de Mamao, de l’artiste Bobby Holcomb au premier député tahitien Pouvanaa a Oopa. Mais aussi, bien évidemment, de nombreux polynésiens.

Ces bâtisses étaient devenus des lieux de société, où tout le monde se croisaient, tout le monde se connaissaient, tout le monde se côtoyait.

Ancien Hôpital de Mamao à Papeete, salle d'opération

La salle d’opération de l’Hôpital de Mamao à Papeete.

Ancien Hôpital de Mamao à Papeete, le patio

Un des patios de l’Hôpital de Mamao à Papeete.

Les impressions d’une hospitalisée en 1971

Les chambres ont des portes, mais il est permis de les laisser ouvertes pour bénéficier du spectacle des voisins et leur en offrir un. Lorsqu’elles sont fermées, les infirmiers pensent à frapper avant d’entrer mais les laissent ouvertes en sortant. L’un d’entre eux a interdit à un jeune visiteur de s’asseoir sur mon lit mais il ne lui est jamais venu à l’idée de sévir contre ceux qui courent dans les couloirs et les escaliers en hurlant, en éteignant l’électricité et en bousculant d’autres malades.

On trouve encore des tifaifai et des coussins sur les lits. Bien qu’il soit interdit de se rendre dans d’autres chambres ou dans d’autres dortoirs, on peut toujours se «débrouiller» pour aller parau parau avec les fetii et les amis et pour aller soit leur offrir ou chercher des biscuits et des fruits…

L’hospitalisation à Tahiti n’a rien de lugubre et de déprimant, elle conserve un charme inimitable d’autant que le personnel médical est sensationnel. Médecins présents de l’aube au crépuscule et tout dévoués à leurs malades, infirmiers et infirmières patients, souriants, malgré un travail difficile.

L’hygiène

Mais… il y a un énorme mais, la saleté. Le soir, les cancrelats courent dans la salle de bain, les toiles d’araignées ornaient mon climatiseur et mon fauteuil roulant, le tiroir de ma table de nuit a été garni pendant 3 semaines d’épingles à cheveux et de cheveux noirs appartenant à je ne sais quelle occupante précédente. Les rideaux de douche lorsqu’on les levait pas innocence, tous étaient raides de crasse et de savon amalgamés.

On n’a pas droit à un rideau en pareo à 200 F sur la fenêtre bien qu’on ait un climatiseur. Les perfuseurs n’ont pas de potence, on les accroche aux lampes. Les chambres à deux lits n’ont qu’une lumière au-dessus d’un seul lit. Si le second malade veut dormir il doit subir la clarté ou l’autre doit se résigner à éteindre.

Le maa

Pour en revenir à la propreté en elle-même j’en reviens également aux femmes de service qui sont nombreuses et ne font rien. Elles servent les repas, donnent un coup de chiffon dans les couloirs et au centre de la pièce, le reste du temps elles bavardent appuyées sur leur balai, cassent la croûte avec les surplus (nous y reviendrons), viennent s’asseoir dans les chambres, y feuilleter les magazines et y fumer, elles déposent le maa à toute allure sur les tables sans les approcher des malades s’ils dorment, même s’ils ne peuvent se lever.

Elles ne donnent pas de jus de fruits le soir sous prétexte, si l’on insiste, «qu’il n’y en a pas beaucoup». Il faut les menacer pour en obtenir. Avoir un deuxième morceau de beurre le matin est impossible alors qu’elles en ont plein les poches pour leur propre consommation ! Je me suis servie de cet argument pour avoir jus et beurre.

A part donc ces quelques remarques sur l’entretien, la propreté et les femmes de service, cet hôpital est vraiment sympathique. On y est merveilleusement soigné et entouré d’une indispensable chaleur humaine qui permet certainement aux malades de guérir mieux et plus vite. »

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Sources :

Nicole Roucheux, impressions d’hospitalisée à Mamao. Mazzelier Tahiti de à l’atome