Célèbre dancing de Tahiti, le Quinn’s va animer la vie nocturne de Papeete dans les années sixties. C’était en quelque sorte une institution de la joie de vivre polynésienne, un haut lieu de la bringue et de la musique tahitienne dont la réputation a fait le tour du monde. Il figure dans le top ten des bars les plus dangereux du monde.

En 1933, le Quinn’s ouvre ses portes sur le front de mer près du marché de Papeete sous la direction de « Bouzou » Frogier et de Marcelle Quinn, née Goupil. C’était une construction locale tout en bambou avec à l’entrée, deux portes de saloon encadrées par deux grands piliers sur lesquels étaient sculptés des tiki.

Le Quinn's en 1953

Le Quinn’s en 1953

Le Quinn's Tahitian Hut, dancing à Papeete en 1970

Le Quinn’s en 1970

Un petit tour en boite

Dès que l’on pousse les fameuses portes saloon, on est tout de suite pris par l’atmosphère typique des îles qui y règne. L’odeur incomparable des couronnes de tiare tahiti et de tipanie se mélange à celle du monoï dont se sont enduits les filles. A l’intérieur, se trouve un immense bar en bois disposé en ovale autour duquel se succèdent les boxes. Au milieu du bar, trônait l’estrade avec l’orchestre. Devant il y avait une grande piste de danse et tout à fait à l’arrière, une petite estrade pour les danseurs.

La musique de bringue complète le bouquet de cette ambiance unique. Les meilleurs musiciens du moment, dirigés par le guitariste Jown Gobrait,  jouent toutes sortes de musique pour satisfaire la clientèle. Tout d’abord pour les locaux qui désirent des valses tahitiennes et des tamure, puis pour les touristes qui veulent entendre du Pop ou du Jazz, et les plus jeunes qui souhaitent du Rock du frug, du watusi et d’autres swim dances de ces années sixties. Mais bien sûr, tous adorent la rumba et le cha-cha. Régulièrement des clients qui ont quelques talents de musiciens viennent chanter ou gratter la guitare avec l’orchestre.

Intérieur du Quinn's

La scène du Quinn’s en 1955

L'orchestre du Quinn's en 1955. Photo Pierre Carabasse

L’orchestre du Quinn’s en 1955. Photo Pierre Carabasse

Les Quinn’seuses

La gente Féminine est représentée par deux « catégories » de fêtardes.

  • La première, les non habituées, sont des vahine «accompagnées » qui portent généralement sur leur tête une belle couronne de fleurs de tiare tahiti bien enfoncée sur leur crâne, au ras des yeux, pour ne pas se faire reconnaître !
  • La seconde, les serveuses que l’on appelle les «Quinn’seuses » ou moins gentiment les «pouffiasses » ! Des filles très sympathiques, qui, lorsqu’elles ont jeté leur dévolu sur vous, vous étreignent très fort et rapidement pratiquent une forte aspiration associée de mordillements vifs à la base du cou : le non moins célèbre « suçon du Quinn’s » qui laisse évidemment des traces et virent au fil des jours en passant par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel.

Soudain, des touristes d’un paquebot fraichement arrivé envahissent le Quinn’s. Les Quinn’seuses nous abandonnent pour pouvoir s’occuper de ces gens bien blonds ou rouquins à la peau bien blanche ou rouge comme des crevettes.

Mais cette agitation donne soif

Au Quinn’s, la bière locale Hinano est de loin le best-seller. Vient ensuite un Whisky qui s’apparente au Scotch, puis le célèbre Punch au vin rouge fait avec du bon gros vin rouge français. Pour les touristes, le Punch au Rhum est le grand favori, mais il est assez surprenant de voir que de nombreuses filles de Tahiti ne boivent pas.

Enfin, il faut vraiment avoir envie d’aller aux Toilettes, qui est un passage obligé compte tenu des hectolitres de bière ingurgités, des punchs au vin rouge…, car ce lieu est pour ainsi dire infâme. Mais, cela aussi fait partie du folklore !

Une règle de sécurité au Quinn’s, est de ne pas s’attarder au comptoir pour communiquer et refaire le monde, prés d’un tahitien dont les yeux exorbités cherchent à vous fixer ou, lorsque un légionnaire cherche à l’imiter. L’imprévisible peut se produire : la bagarre quasi générale.

Les portes de ce haut lieu de la bringue tahitienne ont été fermées définitivement en 1973 par le service d’hygiène pour « insalubrité » !
Quelle erreur ! Il aurait fallu au contraire intégrer ce lieu mythique au patrimoine territorial.


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