C’est au cimetière de Faa’a qu’on célèbre chaque année la nuit du 2 novembre la Fête des Morts. Le cimetière brille, à ras de terre, de mille feux vivants de bougies blanches. Chacun a paré ses tombes, beaucoup de fleurs, mais surtout beaucoup de bougies qui quadrillent le cimetière de motifs apocalyptiques, dessinent des arabesques de feu sur les tombes, soulignent les bordures de pierre.

Tout de blanc vêtu, le Père Curé va bénir les tombes, presque une par une, zigzagant au travers des sépultures pour n’oublier personne. Son aspect fantomatique, son itinéraire indécis, son geste de bénédiction inlassablement répété ajoute encore au mystère de cette liturgie nocturne. Leurs milliers de points lumineux des tombes semblent se faire l’écho des milliers d’étoiles.
Chacun a paré ses tombes, vingt mètres carrés de sable blanc, finement tamisé, que délimite une stricte petite murette en pierre, repeinte à la chaux, sans un nom, sans une fleur, avec seulement une unique bougie plantée au centre du carré funèbre. Il y a des coins plus cossus, avec des tombes aux noms fraternels, gravés sur des stèles de pierre qui ont un aspect familial, unis dans la mort comme ils l’ont sans doute été dans l’existence, par une commune et identique décoration. Voilà de riches marchands ou de simples Paumotu ; des noms connus et d’anonymes syllabes tahitiennes ; et voilà le quartier des tombes chinoises (qui ont pourtant leur cimetière à Arue) dont les inscriptions, gravées en beaux caractères noirs, s’étagent en des formules verticales.

Commentaires