Au cœur des îles polynésiennes pousse un arbre peu connu mais fascinant : le Nono. Entre vertus médicinales, usages insolites et rôle dans la culture locale, ce fruit fort odorant cache bien des secrets à découvrir.
Du Sud-Est asiatique à la Polynésie : L’odyssée du Nono
Le Nono, ou Morinda Citrifolia, est un arbre fascinant originaire du Sud-est asiatique et du Nord de l’Australie. Aujourd’hui, il est présent sur presque toutes les îles du Pacifique, à l’exception d’Hawaï, et se retrouve dans la quasi-totalité des îles de la Polynésie française, où ses vertus médicinales en font un véritable trésor local.
Nono ou Noni : L’histoire méconnue d’un arbre sacré
En tahitien, Nono désigne à la fois l’arbre et son fruit. Le terme Noni a été introduit plus récemment pour commercialiser le jus extrait de sa pulpe. Cette adaptation linguistique visait à éviter la connotation négative du mot “no-no” en anglais et à faciliter son succès sur le marché américain, le premier marché moderne du fruit.
De plus, le terme Noni permettait de ne pas confondre l’arbre avec le nono, un petit moustique des Marquises. Ainsi, Nono et Noni désignent la même plante, mais leur usage varie selon le contexte culturel et commercial.
Secrets botaniques du Nono, petit mais puissant
Le Nono est un petit arbre atteignant rarement plus de 5 mètres. Ses feuilles, glabres et opposées, présentent un vert foncé brillant, tandis que ses branches se couvrent de fleurs toute l’année.
Le fruit du Nono est globuleux à ovoïde, mesure jusqu’à 10 cm et passe du vert pâle au blanc jaunâtre à maturité. Sa surface est irrégulière, formée de polygones accolés. Lorsqu’il mûrit, il devient mou et dégage une odeur forte, souvent jugée incommodante.
Autrefois, les fruits mûrs, crus ou cuits, étaient consommés surtout en période de disette. Aujourd’hui, ils servent principalement à préparer des purées ou des jus, souvent mélangés à d’autres fruits pour atténuer leur amertume.

Fleurs de nono de Tahiti, Morinda citrifolia. © Tahiti Heritage

Nono de Tahiti bien mur. Photo Christian Chene
Bienfaits et vertus médicinales du Nono dévoilés
Les feuilles et les fruits de Nono ont été utilisés pour traiter :
- Les panaris et abcès
- Les brûlures et piqûres de poissons pierre (nohu)
- Les angines et tumeurs abdominales
- Le diabète sucré
- La Ciguatéra (gratte)
Les propriétés antibiotiques et larvicides du jus de Nono ont été reconnues dès 1893 par le pharmacien Cuzent à Tahiti, puis confirmées à Bora Bora dans les années 1940.
Dans les années 1990, le Nono de Tahiti, provenant surtout des Tuamotu et des Marquises, était exporté aux États-Unis et au Japon sous forme de purée. Aujourd’hui, plusieurs petites productions locales de jus de Nono assurent la continuité de cette tradition.
De la racine au tissu : L’art du Nono
Les racines du Nono servaient à produire des teintures : jaune en milieu acide et rouge en milieu basique. Ces teintures étaient appliquées sur les tapa et les more (jupes en fibres végétales) des costumes traditionnels polynésiens.
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Quand le Nono devient complice des jeux polynésiens
À Tahiti, le fruit de Nono servait parfois de projectile pour l’exercice de la fronde. Mais il avait aussi un usage plus coquin : les jeunes filles le cachaient sous la verdure et le lançaient sur le garçon de leur choix. Celui-ci partait alors à la recherche de la belle pour partager des moments de plaisir.
Conclusion : le nono, un héritage à préserver
Le Nono n’est pas seulement un arbre médicinal, il est un patrimoine culturel de la Polynésie française. Entre ses vertus thérapeutiques, ses usages traditionnels surprenants et ses propriétés tinctoriales, le Nono incarne un trésor vivant qu’il faut découvrir, apprécier et préserver.
Sources :
Gilbert CUZENT, Archipel de Tahiti, recherche sur les productions végétales 1893 – Haere Po No Tahiti
Arbres indigènes et arbres introduits de Polynésie française. Direction de l’environnement
Olivier BABIN I.A. 22 nov 2025





