Après ses nombreux exploits, comme sa descente au royaume des ténèbres, le Pô, ou son combat contre le cochon Moiri à Hawaii, Tafa’i, le héros légendaire polynésien cherche à Tataa et au mont Rotui l’âme de sa femme Hina qui vient de décéder. Il la rattrape de justesse par les cheveux aux confins du monde des esprits.

Hina, la femme de Tafa’i vient de décéder

Un jour qu’il revenait d’un long voyage, il eut la douleur de trouver sa femme morte. Elle venait de mourir et son corps, encore chaud, était étendu sur un autel du marae ancestral gardé par les tahua (prêtres) et la famille. Bientôt, dans sa détresse Tafa’i décida de la disputer aux Dieux !

Ayant demandé au tahua de quel coté l’âme de sa femme s’était enfuie. Celui-ci lui dit qu’elle a quitté les lieux sacrés et se trouvait pour l’instant avec d’autres âmes à Tata’a, au Nord-Ouest de Tahiti. Le promontoire de Tataa se trouve en effet être le point d’envol des âmes (rereraa varua ) de Tahiti avant de partir pour le Paradis ou les Ténèbres de Raiatea (voir l’envol des âmes dans la conception polynésienne du monde)

De la pointe Tataa au mont Rotui

Tafa’i, sans perdre de temps, saisit sa grande pagaie et mit à la mer sa pirogue Niu, puis il s’élança sur les eaux calmes du lagon et arriva à Punaauia à la tombée de la nuit juste à temps pour voir le départ des âmes.

Il apprit que l’âme de sa femme était partie depuis peu de temps pour le mont Rotui sur Moorea, où les âmes prennent leur envol pour le mont Temehani à Raiatea, qui était le dernier lieu d’où elles pouvaient revenir dans ce monde.

Il se précipita vers le mont Rotui et en peu de temps se trouva au sommet. Mais là encore il constata que l’âme de Hina était déjà partie depuis quelque temps.

La pointe Tata'a à vue du lotissement Taina

La pointe Tata’a, vue du lotissement Taina

Sur le mont Temehani

Sans se décourager Tafa’i reprit sa pirogue et la fit voler jusqu’à Ra’iatea et sans s’arrêter gravit le mont Temehani jusqu’à un certain endroit sur la montagne d’où partaient deux sentiers, l’un vers la falaise de droite appelée « Pierre de vie » (Te òfaì ora) d’où les esprits montaient a au Rôhutu no’ano’a (paradis). L’autre chemin, descendait dans le cratère béant de Temehani et de là allait dans le Pô auahi (l’enfer).

La lune se couchait et l’étoile du matin annonçait le jour lorsque Tafa’i arriva en ce lieu, il y trouva le dieu Tû-ta-horoa qui gardait l’accès des sentiers. Tafa’i lui demanda si Hina sa femme avait déjà franchi ce lieu et, à son grand soulagement, le dieu lui répondit qu’elle n’était pas encore arrivée. Il ajouta que Tafa’i devait se cacher dans les buissons et reprendre des forces afin de pouvoir la capturer au vol, car c’était le dernier lieu d’où les âmes pouvaient être ramenés en ce monde.

Tafa’i attrape de justesse l’âme de sa femme

A bout de souffle Tafa’i se cacha et à peine avait-il repris des forces qu’il entendit un bruit de feuillage qui remuait ; c’était le dieu qui lui disait de se tenir prêt.

Bientôt Tafa’i aperçut la haute stature de sa femme qui lui était si familière, elle s’avança sur le bord du rocher puis s’écarta brusquement sentant la présence d’un être humain. A ce moment, et avant qu’elle ne pût s’envoler vers la Pierre de Vie où elle lui aurait échappé, Tafa’i fit un bond prodigieux dans l’air et la saisit par les cheveux. Hina se débattit vigoureusement car elle se réjouissait de se rendre dans le monde des esprits, mais son mari tint ferme et, après avoir entendu Tû-ta-horoa lui dire que le temps n’était pas encore venu pour elle de quitter ce monde, elle décida de rentrer avec son mari.

Une fois rentrée à ’Uporu (Mahina), Hina réintégra son corps qui était encore en partait état et tous se réjouirent de l’heureux retour de Tafa’i et de sa femme des confins du monde des esprits.

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Sources :

Légende de Tafa’i. Bulletin de la société des Océanistes n°7 avril 1923
Teuira Henry. Tahiti aux temps anciens. Société des Océanistes 1962 n°1 p 577
La version tahitienne de Tafa’i (ou Tawhaki) traduite par A. Leverd, The Journal of the Polynesian Society 1912. Vol. 21 n°1. traduite par A. Leverd, p 1-12
Pouira a Teauna dit Teraupoo : Parau Tumo no Tafa’i. Service de la Culture et du Patrimoine